SABATIER Georges : né en 1926.
Le plus jeune d'une famille d'agriculteurs de cinq enfants de Lamotte du Rhône. Il rejoint son frère Henri dans la Résistance à l'âge de 16 ans.
A la Libération il adhère aux jeunesses communistes. Il va consacrer son activité à la défense des exploitants agricoles, continuant dans la voie tracée par son père Hubert.
Après la guerre il est élu président du syndicat des exploitants agricoles de Bollène. Il va donner beaucoup de son temps à la création en 1959 du M.O.D.E.F. dans le Vaucluse. Il en est pendant 20 ans le secrétaire général, il est membre du bureau national.
Il représente le M.O.D.E.F aux chambres d'agriculture. Vice président, il a la lourde responsabilité des services juridiques et fonciers. Il est administrateur de la région Provence Corse. Avec les petits paysans corses, il organise l'action contre l'accaparement des terres par des colons en provenance d'Afrique du Nord.
En 1970, il est élu directeur de l'A.S.A. du canal de Pierrelatte-Orange. Organisation en faillite, il la réorganise à des dimensions plus humaines et plus modernes.
Avec le M.O.D.E.F. il est élu vice président, puis président de la coopérative de céréales de la région de Bollène.
En 1978, il crée le syndicat hydraulique Nord Vaucluse. Travaux de remise en état du réseau d'écoulement, station de pompage. Il contribue à l'entretien du lit du Rhône, dragage et aménagement.
Outre son activité syndicale, il milite également au sein du Parti communiste du Vaucluse.
En 1975, il est élu conseiller général et en 1977, maire de Bollène jusqu'en 1989, à la tête d'un conseil municipal d'union de la gauche. Il est également conseiller régional.
Homme de terrain infatigable, il a su acquérir dans notre ville une grande popularité.
Georges SABATIER ne s'est jamais remis de la disparition de son frère Henri, voici son témoignage publié dans "Les chemins de La Résistance à Bollène et dans le canton" livre écrit par Charles MONIER.
« C’était le 28 mai 1944. Trois heures du matin ; deux voitures arrivent en trombe dans la cour de la ferme ; six hommes descendent, sonnent ; ma mère ouvre les volets de sa chambre : « Police allemande, ouvrez-nous ! » Ma mère descend, ouvre la porte, ils montent les escaliers en trombe, ils ne se trompent pas, la chambre d’Henri, Henri n’est pas là, ils touchent les draps, ils sont froids : « où est votre fils ? Il est à AVIGNON, il n’est pas rentré. » Ils font le tour des chambres, celles de mes sœurs, puis ma chambre : « Petit tu ne bronche pas, nous allons revenir. »
Deux hommes restent dans le couloir. Il me faut partir ! Ma mère et mes sœurs m’embrassent. Je descends : « Où vas-tu ? Je vais donner à manger à mes chevaux… »
Me voilà sorti de la maison, il faut ramper car ils sont une vingtaine d’hommes armés autour d’un camion. Je dois longer le LAUZON pour arriver à la ferme CHARET où Henri et d’autres camarades se cachent. Les avertir, prendre des décisions, déménager des armes, des explosifs ; il y a des miliciens et des allemands partout et à la ferme trois femmes…On passe la nuit à l’abri dans un cabanon isolé dans les bois. Un voisin résistant vient nous avertir, on déménage vers la DROME. La maison est toujours occupée y compris la nuit par des miliciens. Quelle nuit d’angoisse pour ma mère et mes sœurs.
Le samedi, l’occupation se renforce : police de Vichy, SS. Dans l’après midi un gradé allemand vient informer ma famille que la maison va être détruite à l’explosif, il pose un gros colis sur la table : « Vous avez deux heures pour déménager ! »
Mes sœurs attellent un cheval à une charrette et chargent quelques affaires, les miliciens et les SS dévalisent la maison. Elles partent vers le PONT de la PIERRE et attendent…
Le gradé revient avec des hommes : « si vos fils se rendent, nous vous rendrons tout, pour le moment votre » maison ne sera pas rasée.
Les jours passent, elles assurent toutes les trois les travaux de la ferme, elles se font aider quand c’est possible avec le balai incessant des SS et de la milice.
Dans la DROME, j’avais quelques nouvelles de la maison, avant le 28 mai nous avions emporté des armes de la ferme. Que se serait-il passé autrement ?
Début août, Henri vient me voir dans la DROME ; c’est la dernière fois avant sa disparition à LYON vers le 11 août…